Licenciement pour refus de modification du contrat de travail

Licenciement pour refus de modification du contrat de travail - Jurisprudence de la Cour de cassationUn licenciement résultant du refus par un salarié d’une modification de son contrat de travail, proposée par l’employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement économique et non un licenciement pour motif personnel. La proposition de modification du contrat de travail doit résulter de difficultés économiques, de mutations technologiques ou d’une réorganisation de l’entreprise indispensable à la sauvegarde de sa compétitivité. Jurisprudence de la Cour de cassation.

Le contexte du licenciement pour refus de modification du contrat de travail

Un salarié engagé en  juin 1983 comme aide-comptable par la société Soft et ensuite promu trésorier comptable, travaillait à Rillieux-la-Pape (69). Son employeur l’a informé, le 31 octobre 2012 du transfert de son contrat de travail à la société IEC Events, dans le cadre d’un plan de cession, décidé par jugement du tribunal de commerce du 31 juillet 2012.

Le nouvel employeur a indiqué au salarié que son lieu de travail était transféré de Rillieux-la-Pape (dans le Rhône) à Rennes (en Ille et Vilaine). Ce transfert découlait, selon l’explication fournie par l’employeur, de la démission du directeur administratif et financier de Rillieux-la-Pape. Une modification de son contrat concernant son lieu de travail était donc proposée au salarié.

Le 20 novembre 2012, le trésorier comptable a fait part à son employeur de son refus de la modification de son contrat de travail.

Du fait de son refus de la modification de son contrat de travail, le salarié a été licencié pour cause réelle et sérieuse, le 31 janvier 2013.

Le contentieux suite au licenciement

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour contester le caractère réel et sérieux de son licenciement, qui selon lui est un licenciement économique, et obtenir des dommages et intérêts.

 La cour d’appel valide le licenciement

Pour dire que le licenciement est basé sur une cause réelle et sérieuse pour un motif personnel, la cour d’appel a retenu :

  • que la modification du contrat de travail proposée était consécutive à la réorganisation du service financier de l‘entreprise ;
  • que cette réorganisation relève exclusivement du pouvoir de direction de l’employeur ;
  • que le refus par le salarié de la modification de son contrat de travail n’est pas compatible avec la continuation de son contrat de travail et par conséquent justifie la rupture du contrat de travail.

La cour d’appel a conclu que le salarié « a fait l’objet d’un licenciement pour un motif inhérent à sa personne et qu’il n’est pas fondé à soutenir avoir fait l’objet d’un licenciement pour motif économique » (arrêt de la Cour d’appel de Lyon, du 9 décembre 2016).

La Cour de cassation annule l’arrêt de la cour d’appel

Le salarié ayant formé un pourvoi auprès de la Cour de cassation, celle-ci s’est prononcée.

Elle a considéré que

  • d’une part, « le seul refus par un salarié d’une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement » ;
  • d’autre part, «  la rupture résultant du refus par le salarié d’une modification de son contrat de travail, proposée par l’employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique » ;
  • « en statuant comme elle a fait, alors qu’il résultait de ses constatations que le motif de la modification du contrat de travail refusée par le salarié résidait dans la volonté de l’employeur de réorganiser le service financier de l’entreprise et qu’il n’était pas allégué que cette réorganisation résultait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu’elle fût indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise, en sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Par ces motifs, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions, l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 9 décembre 2016 (Cour de cassation, chambre sociale, 11 juillet 2018, N° : 17-12747).

Conclusion :

Le refus par un salarié d’une modification de son contrat de travail, proposée par l’employeur n’est pas suffisant à lui seul pour justifier un licenciement. Il peut entraîner un licenciement économique (et non un licenciement pour motif personnel) si l’employeur a invoqué de manière justifiée que des difficultés économiques, des mutations technologiques ou une réorganisation de l’entreprise indispensable à la sauvegarde de sa compétitivité, rendaient nécessaire la modification du contrat de travail. Jurisprudence de la Cour de cassation.

Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.

Sources : Jurisprudence de la Cour de cassation ; code du travail article L 1233-3.

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