L’obligation de reclassement
Le respect de l’obligation de reclassement est une condition du licenciement économique. En fait, l’employeur doit loyalement rechercher les possibilités de reclassement des salariés concernés. Selon le Code du travail « Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque […] le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie […]. » Mise à jour le 8 janvier 2018.
L’obligation de rechercher un reclassement
Lorsqu’une entreprise, quelle que soit sa taille, envisage de procéder à un ou plusieurs licenciements économiques, elle a l’obligation de faire tout ce qui est possible pour permettre le reclassement du ou des salariés concernés.
Cette obligation s’applique quel que soit le nombre de salariés concernés ou la taille de l’entreprise. L’artisan ayant un seul salarié est concerné comme la très grande entreprise de 100 000 salariés.
Le fait que l’entreprise doive établir ou non un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ne change rien à cette obligation. Qu’un congé de reclassement ou un congé de mobilité soit prévu dans l’entreprise ne change rien non plus quant à l’obligation de reclassement que doit satisfaire l’employeur engagé dans un licenciement économique.
Quant à la position du salarié qui est en droit de refuser une proposition de reclassement, elle ne peut être prise en considération qu’à l’occasion d’une offre valable de reclassement qui lui est proposée par l’employeur.
Quand l’employeur doit-il rechercher les reclassements ?
Pour chaque salarié concerné, la recherche de reclassement doit être effectuée entre le moment où le licenciement économique du salarié est envisagé et la notification individuelle de son licenciement économique par envoi de la lettre de licenciement.
La Cour de cassation considère que « le licenciement économique d’un salarié ne pouvant être prononcé que si le reclassement de l’intéressé n’est pas possible, il en résulte que le reclassement doit être tenté avant la notification du licenciement » et « qu’il s’ensuit que les possibilités de reclassement s’apprécient antérieurement à la date du licenciement, à compter du moment où celui-ci est envisagé » (Cour de cassation, chambre sociale, 30 mars 1999, N° : 97-41265). Cette jurisprudence a constamment été suivie.
Lorsqu’un poste vient à être disponible le lendemain de l’envoi de la lettre de licenciement, il ne peut être reproché à l’employeur de ne pas l’avoir proposé en reclassement (Cour de cassation, chambre sociale, 13 novembre 2012, N°: 11-14162).
Caractéristiques des reclassements à rechercher
La recherche de reclassement par l’employeur doit être conduite avec loyauté et sérieux. Les emplois pouvant être proposés en reclassement doivent être adaptés aux compétences des salariés concernés.
L’obligation d’adaptation des salariés à reclasser à de nouvelles fonctions, est limitée aux formations simples, permettant d’être rapidement opérationnel ; « si l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation des salariés à l’évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé d’assurer la formation initiale qui leur fait défaut » (Cour de cassation, chambre sociale, 3 avril 2001, N° : 99-42188).
La recherche de reclassement doit porter sur tous les emplois salariés disponibles, relevant de la même catégorie que celui de l’intéressé ou sur des emplois équivalents rémunérés à un niveau équivalent, dans le périmètre de recherche d’un reclassement.
A défaut, à la condition qu’il n’existe pas dans l’entreprise des emplois disponibles de la même catégorie et uniquement dans ce cas, l’employeur doit rechercher et proposer aux salariés concernés des emplois de catégorie inférieure (Cour de Cassation, chambre sociale, 17 janvier 2013, N° : 11-26239).
Une différence de temps de travail peut aussi exister entre l’emploi qu’occupait le salarié et celui proposé en reclassement. Ainsi, un salarié à temps complet peut, se voir proposer un temps partiel et inversement. L’accord du ou des salariés devra être obtenu de manière exprès par écrit (sans contestation possible sur la réalité de l’accord du salarié). En pratique, il conviendra que l’employeur signe un avenant au contrat de travail avec chaque salarié.
La recherche du reclassement doit être menée sur le territoire national dans l’entreprise et, le cas échéant, celles du groupe dans le périmètre de recherche du reclassement.
Comment l’employeur doit-il proposer son offre de reclassement ?
Avant l’ordonnance du 22 septembre 2017
Pour les procédures de licenciement économique engagées avant la publication de l’ordonnance du 22 septembre 2017 (J.O. du 23), l’employeur devait proposer le reclassement individuellement à chaque salarié concerné en apportant des informations précises sur le poste proposé.
Ce que prévoit l’ordonnance du 22 septembre 2017
Pour les procédures de licenciement économique engagées après la publication de l’ordonnance du 22 septembre 2017 (J.O. du 23), l’employeur peut comme avant adresser de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié, mais il peut aussi diffuser « par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés ». Cette dernière solution, qui sera plus simple pour l’employeur, devrait éviter de nombreux contentieux.
Pour chaque poste offert en reclassement, l’employeur doit précisé le contenu précis du poste (intitulé, localisation, niveau de rémunération, classification…).
Selon le décret d’application du 21 décembre 2017, si l’employeur a choisi de diffuser une liste des offres de reclassement interne :
- la liste doit inclure tous les postes disponibles situés sur le territoire national dans l’entreprise et les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie ;
- l’employeur doit préciser les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, ainsi que le délai dont dispose le salarié pour présenter sa candidature écrite (ce délai ne peut toutefois être inférieur à 15 jours francs à partir de la publication de la liste, ou à 4 jours francs en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’entreprise) ;
- l’absence de candidature écrite d’un salarié à l’issue du délai vaudra refus des offres.
Conséquence du défaut de recherche effective du reclassement
Si l’entreprise n’a pas effectué une recherche de reclassement effective et sérieuse, le licenciement sera privé de cause réelle et sérieuse. Ainsi, par exemple le simple envoi d’une lettre circulaire aux autres sociétés du groupe, en guise de recherche de reclassement, n’est pas considéré comme suffisant par la jurisprudence (Cour de cassation, chambre Sociale, 17 octobre 2001, N° : 99-42.464).
Si l’entreprise a embauché de nouveaux salariés pour des emplois que le ou les salariés à reclasser auraient été capables d’exercer (Cour de cassation, chambre sociale, 6 février 2001, N°: 99-40881), ou si l’entreprise fait appel à des intérimaires pour pourvoir des emplois pérennes qui pourraient être offerts en reclassement, le licenciement sera considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le risque pour l’employeur
En cas de contentieux, il revient à l’employeur « de justifier qu’il a recherché toutes les possibilités de reclassement et qu’un reclassement était impossible » (Cour de cassation sociale, 5 juillet 2011, N° : 10-14625). Si l’employeur ne remplit pas son obligation de reclassement, celle prévue par la loi et le cas échéant celle prévue par la convention collective, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse par la justice prud’homale si elle est saisie.
Comment l’employeur peut-il justifier une impossibilité de reclassement ?
Le meilleur moyen pour l’employeur de prouver l’impossibilité du reclassement, en cas de contentieux, consiste à produire les registres uniques du personnel de l’entreprise et, si l’entreprise appartient à un groupe, de chacune des sociétés de celui-ci entrant dans le périmètre de recherche obligatoire d’un reclassement. Ces registres montreront, si c’est bien le cas, qu’il n’y a aucun poste disponible pouvant être proposé comme reclassement.
Si certains reclassements ont été proposés, les registres du personnel montreront qu’ils sont bien les seuls possibles.
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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.
Toutes les informations sur la sauvegarde des emplois et le reclassement interne
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Sources : Code du travail legifrance.gouv.fr ; ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail ; décret n° 2017-1725 du 21 décembre 2017 relatif à la procédure de reclassement interne sur le territoire national en cas de licenciements pour motif économique ; jurisprudences de la Cour de cassation.
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